CONTEXTE RÉGIONAL

On définit communément les pays de la région Asie Pacifique comme ceux qui ont besoin du soutien américain pour contrebalancer la montée en puissance chinoise dans cette partie du monde. Ce partenariat accelère les rapprochements économiques et culturels avec l'occident si bien qu'en matière de censure les enjeux sont de plus en plus communs.  

Depuis la fin des avant-gardes, l'art contemporain a pris d'innombrables directions sans hiérarchie, permettant le développement d'une grande variété de talents artistiques, critiques et curatoriaux. Mais depuis une trentaine d'années, cet équilibre est de plus en plus remis en cause par de puissantes entreprises aux marques mondiales ayant choisi d'utiliser le mécénat de l'art contemporain comme un outil de communication au service de leurs marques. Le prix a payé est élevé : avec un monde de l'art de plus en plus façonné par les intérêts de ces grands groupes qui placeront toujours en premier la réputation mondiale de leurs marques, les conservateurs et les artistes ont été au fil du temps de plus en plus censurés. A présent la plupart d'entre eux connaissent les règles du jeu et choisissent donc, soit de refuser des propositions de travail souvent très bien rémunéré, soit de collaborer et de s'autocensurer en conséquence. C'est la raison pour laquelle les cas de censure comme celui décrit ci-dessous deviennent de plus en plus difficiles à détecter.

 

CENSEURS : SEOUL OLYMPIC MUSEUM OF ART, Séoul, Corée du Sud

En 2021, le Seoul Olympic Museum of Art (SOMA Museum) a présenté une exposition organisée par Stephanie Seungmin Kim, intitulée Body & Mind ([Mom] &[Mam] en coréen). Cette exposition était une exploration de la façon dont les humains ont développé et transformé notre compréhension du corps et de l'esprit à travers différentes formes d'art selon les époques. Elle observait également comment l'intelligence artificielle et la technologie corporelle repoussent aujourd'hui les limites du corps et de l'esprit.

Dans ce contexte, la curatrice a inclus l'œuvre de Jia Chang Standing Up Peeing à côté de trois photographies montrant le Discobole de Myron et le Doryphore (ou "Porte-lance") de Polyclète. Ces dernières œuvres d'art ont longtemps été considérées comme des symboles d'harmonie, d'équilibre et d'énergie athlétique transformées en œuvres d'art intemporelles. Stephanie Kim a voulu montrer comment les photographies de Jia Chang, tout aussi époustouflantes visuellement, contrastent avec Diskobolos et Doryphoros, montrant quelque chose de très différent - sinon opposé - de ces symboles et idéaux.

Lors de l'installation des œuvres, le personnel du musée est venu voir les résultats et s'est opposé avec véhémence à l'idée de montrer de telles œuvres dans un musée destiné à un public familial. Malgré les arguments de la commissaire, l'intéret clair et puissant qu'il y avait à presenter un tel contraste, et le fait que tous les sujets étaient nus, elle a été contrainte de retirer l'ensemble des photographies de Jia Chang de la série Standing up Peeing.

 

AC, 11/18/2022